Le rôle des constructeurs automobiles pour la mise sur le marché de voitures électriques semble ambigu. D’un coté, nous avons vu que de nombreux programmes de recherches sur la voiture écologique avaient été lancés pour aboutir à des prototypes performants de véhicules électriques. D’un autre coté, il semble que la volonté d’industrialiser ces automobiles électriques et de les mettre sur le marché a manqué, comme en témoignent les campagnes de publicité médiocre de l’EV1 de Général Motors. En France également, les programmes de développement autour de la voiture electrique n’ont jamais débouché sur une industrialisation et une distribution massive des voitures propres en concession.
Et pour cause : les programmes de développement des voitures electriques n’ont pas nécessairement eu pour finalité de mettre sur le marché un véhicule propre. Ils ont systématiquement eu des causes exogènes aux stratégies commerciales des constructeurs automobiles. Les motivations ont notamment été :
● D’ordre marketing : les programmes de recherche sur la voiture électrique ont largement servi de support de communication à l’image de l’entreprise. Le retour sur investissement des programmes de développement de véhicules électriques était attendu en termes de gain d’image de marque, et non en nombre de véhicules électriques commercialisés. Les manufacturiers développent de coûteuses Formule 1 pour mettre en avant leur savoir- faire technique et le haut niveau technologique de leurs véhicules, et non pour les commercialiser ! Il en a souvent été de même pour les voitures électriques : le programme visait à communiquer sur la compétence environnementale et le thème de l’économie d’énergie, au même titre que les concepts cars mettent en avant le style de design de la marque. Mais dans l’esprit, ces programmes de voitures électriques n’ont pas vocation à se transformer en succès commercial.
● Sous la contrainte d’autorités administratives : le point de départ des programmes de véhicule électrique n’a jamais été lié à la détection d’une évolution du marché. Ces programmes ont généralement eu pour point de départ des faits politiques ou des volontés publiques. Les liens entre les autorités publiques et les constructeurs sont en effet très étroits : les constructeurs sont de gros employeurs et donc, des acteurs incontournables du marché de l’emploi de certaines régions. Ils réalisent également de gros investissements industriels. Leurs ventes sont également liées aux mesures fiscales prises par les pouvoirs publics (taxe carbone, prime à la casse, subventions, …). La collusion d’intérêts est donc importante entre pouvoir publiques et constructeurs automobiles. Rappelons par exemple que l’état français détient 15% du capital de Renault et l’a sauvé au même titre que PSA avec un prêt de 3 milliards d’euros pendant la dernière crise. Sans aller plus loin dans le détail, nous comprenons que la mise en place de programmes de recherche sur la voiture électrique s’est faite par le passé sur une initiative partagée entre pouvoirs publiques et constructeurs automobiles. De ce fait, certains programmes sur la voiture electrique ont été réalisés sous une certaine contrainte par les constructeurs. Le développement de prototypes de voitures électriques était souvent la clé de l’obtention d’importantes subventions, en France par exemple lors de la crise de 2008, ou en Californie lorsqu’il a été décrété que les constructeurs ne pouvaient continuer de faire leur métier que si 5% de leurs ventes étaient des voitures écologiques. Le développent de l’automobile électrique a ainsi souvent relevé du fait politique et non économique.
Dans ces conditions, nous comprenons que les programmes de voitures durables ont eu pour finalité première le développement de prototypes et étaient guidés par une vision dans laquelle les rationalités du marché étaient lointaines. Aussi, si les constructeurs automobiles ont pu se montrer enthousiastes dans la mise en place de programmes de recherche sur la voiture électrique, ces derniers se sont retrouvés en position inconfortable lorsque les véhicules électriques ont été mis au point et prêts à être livrés sur le marché.